(Pré-)contentieux et analyse du risque

"L’intelligence judiciaire et les méthodologies employées

1. Approche statistique pour la « justice prédictive »

En France comme à l’étranger, ces outils qui s’appuient sur la méthodologie statistique fonctionnent de la manière suivante :

• - ils fondent leur résultat sur l’exploitation de statistiques (notamment des moyennes) calculées sur un grand nombre de décisions rendues (de l’ordre de plusieurs millions en France) ;

• - une fois que l’utilisateur a entré des mots clefs, ex. « prestation compen- satoire », la machine va aller chercher dans ce vaste corpus de décisions toutes celles qui contiennent ces mots clés ;

• - elle va ensuite extraire le sens de la décision, et, le cas échéant, les mon- tants prononcés au titre des condamnations : diverses statistiques sont alors proposées, comme la moyenne des montants.

• Outre le fait que les statistiques émises par ces legaltech en matière de justice prédictive sont par définition calculées sur des informations passées (la jurisprudence) et ne peuvent donc en aucun cas produire de « prédictions », cette approche présente d’autres limites.

• Limites de l’approche statistiques : le nombre de décisions disponibles

  • - Dans de nombreux domaines du droit, il y a en général trop peu de déci- sions pour que l’on puisse calculer des statistiques robustes ;

  • - bien que les fonds de ces outils contiennent plusieurs millions de déci- sions, si les mots clés pointent par exemple le fait que l’utilisateur est intéressé par une question concernant une rupture brutale d’une relation commerciale établie, les calculs ne se feront en réalité que sur moins de 1500 arrêts car c’est le nombre de décisions qui ont été rendues par la cour d’appel de Paris depuis qu’elle est seule compétente sur ce sujet(2012) ;

  • - si l’on regarde parmi ces dossiers ceux pour lesquels, par exemple, la durée de la relation est de 10 ans, l’auteur est un commerçant, la victime a procédé à des investissements dédiés et était dans une relation exclusive, on ne trouve alors qu’une poignée d’arrêts correspondants. Il est donc trompeur de dire que les statistiques ont été calculées sur des « millions de décisions » : elles l’ont en réalité été sur quelques unités à quelques centaines au mieux. La pertinence d’une moyenne sur ces quelques arrêts est alors sujette à caution."